Semblable à l’ASSÉ, l’association large ayant favorisé la coordination de la grève de 2012, la Coalition de Résistance pour l’Unité Étudiante Syndicale (CRUES) vise à mettre en commun les efforts des associations étudiantes afin de construire et entretenir un rapport de force face à l’État et au capitalisme qui maintiennent les étudiant·es dans des situations de précarité. C’est ainsi que le 29 avril 2023, à son premier Congrès annuel, la CRUES s’est dotée du mandat suivant: « Be it resolved that the CRUES initiate an increase in pressure tactics to obtain the remuneration of all internships and in this sense organize the holding of two weeks of strike action in the winter session of 2024; » La revendication de la salarisation des stages n’a rien de nouveau. Elle existe dans le milieu étudiant depuis plusieurs années en réponse à l’exploitation et aux abus que subissent des milliers de personnes dans le cadre de leurs stages. Face aux refus systématiques de la CAQ d’améliorer les conditions matérielles des stagiaires, le mandat de la CRUES est clair : construire un rapport de force dans la rue avec la ferveur et la détermination nécessaires pour faire fléchir le gouvernement. Parce que le vrai rapport de force ne se construit pas autour d’une table de négociation, mais dans la rue! 

On peut se remémorer les CUTE (Comités unitaires sur le travail étudiant) qui ont commencé à se mobiliser autour de la précarité des stagiaires en 2016. C’est à la solidarité étudiante et à ses menaces de grèves générales en hiver 2019 que l’on doit l’obtention de bourses d’études dans plusieurs programmes. Évidemment, nous sommes toujours loin de notre objectif : les stagiaires ne sont toujours pas salarié·es. On peut tout de même reconnaître la force de la grève: c’est sa menace qui a permis l’obtention des bourses, et c’est son exécution qui permettra la salarisation de tous les stages. 

Plusieurs grèves ont d’ailleurs été menées dans la dernière année en faveur d’une salarisation des stages, que ce soit à Montréal, en Outaouais ou à Rimouski. Ces grèves ont rapidement attiré une vague de solidarité et une attention de la part des médias et de certain·es ministres. Dans l’optique de continuer l’escalade des moyens de pression, nous appelons à une manifestation large le 10 novembre 2023 pour souligner la journée internationale des stagiaires et revendiquer une salarisation pour tous les stages. 

Il faut surfer sur la vague de mobilisation qui entraîne, campus après campus, à voter des mandats de grèves et tenter de l’unifier afin de faire front commun face au gouvernement. Le contexte actuel nous est certainement favorable et nous devons nous mobiliser dès maintenant pour saisir notre opportunité d’obtenir des gains significatifs. Malgré les nombreuses manifestations, pétitions, lettres, rencontres avec ministres, le gouvernement continue de faire la sourde oreille. Il est temps d’agir collectivement. Une grève générale est nécessaire afin de perturber le système éducatif, bâtir une solidarité interassociative et faire trembler le statu quo qui perpétue la misère des stagiaires.

Que vous soyez stagiaire ou non, ce mouvement nécessitera la solidarité de tous et toutes afin d’obtenir du gouvernement ce que nous exigeons. C’est ensemble, dans nos nombreux établissements et à travers nos actions, que nous vaincrons. 

Récapitulatif des grèves générales au soi-disant Québec 

  • 1968 : La grève est large et dure un mois. Elle permet le gel des frais de scolarité jusqu’en 1990. 
  • 1974 : Deux grèves ont lieu pour réclamer l’abolition des TAEU (tests d’aptitude pour les études universitaires) et l’amélioration du régime des prêts et bourses. Les grèves apportent les gains souhaités. 
  • 1978 : La population étudiante demande la gratuité scolaire et de nouvelles améliorations aux prêts et bourses. Devant l’ampleur du mouvement, le gouvernement concède rapidement à apporter des améliorations, sans concéder à la gratuité scolaire.
  • 1986: Le gouvernement libéral menace de dégeler les frais de scolarité. Une grève étudiante combative oblige le parti à reculer. 
  • 1996 : Le gouvernement péquiste menace d’augmenter les frais de scolarité de 30%. Une grève de trois semaines l’en empêche et permet le gel des frais pendant dix ans.
  • 2005 : Le gouvernement Charest procède à une réforme de certains aspects du régime des prêts et bourses, transformant 103 millions de dollars de bourses en prêts. Le gouvernement fait marche arrière suite à la pression de la grève. 
  • 2012 : La plus grande grève étudiante de l’histoire du soi-disant Québec, regroupant plus de 300 000 étudiant·es en grève, parvient à bloquer la hausse de 1625 $ de frais de scolarité annoncée par le gouvernement libéral.

 

Écrit par Lauriane Dinucci au nom du conseil exécutif de la CRUES
Illustré par Julien Crête Nadeau

  1. Coalition de Résistance pour l’Unité Étudiante Syndicale, « Campagnes et revendications », https://crues.org/campagnes-et-revendications/.
  2. Collectif Un salaire pour toustes les stagiaires, « Le combat des stagiaires reprend », Montréal Campus, 8 mars 2022,  https://montrealcampus.ca/2022/03/08/le-combat-des-stagiaires-reprend-2/.
  3.  Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante, Feuillets d’information sur la grève générale illimitée, p. 8, https://ancien.asse-solidarite.qc.ca/documents/fr/materiel_dinfo/tracts_feuillets/feuillet-greve-web.pdf/